Bloc opératoire, comment réduire l’empreinte environnementale ?

Le bloc opératoire est un point névralgique du système hospitalier qui représente à lui seul 20 à 30 % des déchets produits au sein d’un établissement1 (et 40 % des dépenses2). S’il est nécessaire de faire évoluer les pratiques face à un besoin en soin croissant (vieillissement de la population, augmentation des maladies chroniques…), réduire l’empreinte environnementale est tout aussi essentiel que complexe.

Thomas Gautier, chirurgien viscéral et digestif à la clinique Saint-Jean de Montpellier (TG) et Maxime Detavernier, pharmacien, expert santé chez Citwell (MD), nous partagent leurs visions et bonnes pratiques pour une croissance contrôlée de la chaîne d’actes hospitalière.

Comment concilier objectifs de sécurité (et de qualité) des soins et de développement durable à l’hôpital ?

MD L’ambition est commune et repose sur la même base, partir de la raison d’être des établissements de santé, le soin, pour arriver à une approche globale et multicritère. Il faut pour cela fédérer d'emblée les professionnels de santé, mais aussi tous les personnels administratifs et techniques qui participent à la vie des structures.

TG Ce sont deux enjeux essentiels et indissociables qui vont dans le sens du bien-être collectif. Ce qui est bon pour la santé doit être bon pour l’environnement et vice versa.

Quels niveaux d’action identifiez-vous en termes de développement durable ?

TG À mon échelle – le bloc opératoire – et à celle de mon établissement, le premier niveau d’action concerne la gestion des consommables, des déchets3 et des ressources. Lutter contre le gaspillage implique en premier lieu de former les équipes4 et d’améliorer les protocoles. Dans un deuxième temps, c’est la lutte contre l’usage unique qui s’engage, pour un remplacement progressif avec du réutilisable… Même si le coût initial est plus important, la rentabilité sur le long terme est avérée.

MD Il faut dans un premier temps susciter l’intérêt et stimuler les équipes en lançant des initiatives de terrain. C’est l’étape de prise de conscience collective des enjeux. Concernant la gestion des produits de santé, les réflexions s’orientent sur des sujets très concrets tels que la gestion des déchets, la réduction des commandes, la sobriété de consommation en évitant les périmés ou en limitant le recours à l’usage unique etc. En engageant une réflexion sur la fonction achat, nous pouvons travailler sur le référencement de fournisseurs certifiés ou accrédités, de chartes ou de labels d’écoresponsabilité lors des appels d’offres. Avec des critères assez simples et, surtout, accessibles à tous les établissements quelle que soit leur taille, on peut avoir un impact direct assez important. C’est motivant pour les équipes d’observer les résultats qui traduisent leur capacité d’agir.

La montée en maturité doit ensuite conduire à une structuration et à une intégration de cette dimension à un niveau stratégique tel qu’un projet d’établissement ou de territoire. C’est à cet échelon qu’il est possible de décliner des programmes à fort impact en se dotant de moyens adaptés.

Le dernier niveau d’action est celui de la communication des résultats d’expérimentations locales au sein des communautés professionnelles et de stimulation des discussions avec l’ensemble des parties prenantes : les sociétés savantes, les décideurs de l’administration et des politiques publiques, les représentants des industriels comme le LEEM ou le Snitem5.

 

En quoi l’écoconception participe-t-elle d'une approche globale du soin ?

MD L’écoconception en santé est une méthode de travail qui permet de repenser la production des soins en considérant tous ses déterminants et tous ses outputs6 . Elle se travaille à 360°, depuis la chimie et la production des matières premières pour les médicaments et les dispositifs médicaux, en passant par les machines des opérateurs biomédicaux jusqu'aux patients. Il est à espérer que les critères d’écoconception deviennent des critères durs d’évaluation en santé au même titre que les critères cliniques ou médico-économiques.

TG Pour moi, l’écoconception doit contribuer à diminuer l’empreinte carbone et à préserver les ressources tout en étant viable économiquement et en procurant un meilleur service rendu. Je regrette qu’on nous propose encore aujourd’hui des produits entièrement jetables sans démonstration de bénéfices pour le patient ! De ce point de vue, les dispositifs au moins en partie réutilisables ou rechargeables telles que les agrafeuses représentent un premier pas. Je pense qu’il faut parvenir à diminuer l’usage unique dans sa globalité en s’appuyant sur des collaborations accrues entre pharmaciens, praticiens, opérateurs biomédicaux et industriels.

Comment répercuter ces considérations écologiques au niveau des prises de décision d’achats ?

MD Les pharmaciens doivent jouer ici un rôle structurant dans la mesure où ils sont l’interface avec les professionnels du soin et des industriels, notamment dans le cadre des appels d’offre. Cela signifie y intégrer des critères de développement durable qui ont potentiellement un impact direct sur le bilan carbone de nos structures. Nous débattons beaucoup sur l’usage unique, la réduction de déchets d’emballages via les customs packs7, les gaz halogénés en anesthésie etc. Il est désormais possible de concevoir des plans d'amélioration des pratiques à la fois chirurgicales, d'achat, de durabilité des soins ou d'écoconception en nous appuyant en particulier sur le data management.

Quelle place occupe le bloc opératoire dans cette démarche environnementale ?

TG Le bloc se doit d'être très réactif, avec une énorme capacité d'adaptation dans un environnement extrêmement sécurisé et protocolisé. Il est aussi multiprofessionnel et pluridisciplinaire par essence. C’est en fait l’un des meilleurs lieux pour mettre en œuvre des innovations à l’hôpital et les transposer ensuite dans d’autres services de soins !

MD Il est toujours pertinent de commencer à mettre en œuvre des actions environnementale là où l'impact est le plus important. La sensibilité et l’énergie des communautés professionnelles présentes au bloc constituent indéniablement un bon terreau pour créer des expérimentations d'ampleur et tracer des trajectoires ambitieuses.

Le mot de la fin ?

MD Le meilleur soin en termes de développement durable et d’empreinte écologique, c'est le soin qui n’existe pas… Autrement dit, au-delà de tous nos efforts et stratégies, il faut aussi et surtout miser sur la prévention.

TG Nous devons être le plus vertueux possible en gardant au cœur de nos préoccupations la sécurité des patients et le développement de nouvelles solutions.

Sources :

[1] Source : Ryan S. Sustainable Anesthesia. Anesthesia Analgesia, 2012, volume 114, n°5.
[2] Source : Guerriero F. et Guido R. Operational Research in the Management of the Operating Theatre: A Survey, Health Care Management Science, 2011, n°14, pages 89-114.
[3] La mise en place du tri sélectif a permis une réduction de près de 70 % des DASRI qui sont maintenant restreints aux appareils tranchants. Une manière également de réduire les coûts de traitement afférents.
[4] Le rajeunissement des collaborateurs est aussi un levier car ces derniers sont de plus en plus conscients des enjeux environnementaux.
[5] LEEM : organisation professionnelle des entreprises du médicament opérant en France. Snitem : syndicat national de l'industrie des technologies médicales.
[6] Les outputs ou extrants sont les produits issus de la transformation productive et destinés à être vendu à des utilisateurs, soit pour de nouvelles transformations (produit intermédiaire), soit pour un usage final (consommation ou investissement).
[7] Les custom packs sont les dispositifs médicaux nécessaires à une intervention chirurgicale et emballés dans un set stérile.

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